La tristesse enfin

La tristesse enfin
La saveur du dégoût,
l'absence de tout,
le vide sans limite, absolu,
l'abandon total, si souvent prévu,
étaient soudain mon univers,
froid comme l'acier en hiver.

J'en connaissais déjà la sensation
et peut-être même les raisons.
Je les avais dix fois vécus,
Ils m'avaient dix fois vaincu.
Pourtant je restai sidéré
n'éprouvant que l'infini regret

de ne pas, au moins, avoir peur
pour fuir cette indicible horreur,
au moins, avoir mal
pour oublier ce froid minéral
où je n'avais plus rien d'humain...
Puis la tristesse est venue enfin...

comme une délivrance, un soulagement.
Avoir au moins un sentiment.
La tristesse comme seule arme.
Et enfin les flots de larmes
et enfin les mots tremblants
pour repousser le néant.

Christian Dehais - Tous droits réservés